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Heard what you said in front of my head, making me sober. Taking it in, you can't pretend you didn't notice. Pick it apart, back to the start
I didn't know ya.La musique enveloppa son corps en même temps que la bourrasque de chaleur tandis qu'elle traversait le petit couloir qui allait de la porte d'entrée jusqu'à la salle principale. Jill était passée devant les vestiaires sans ralentir, sans accorder un seul regard à l'employé qui s'affairait avec les quelques personnes devant lui. Une fois la foule atteinte, elle laissa glisser le bras de l'homme à ses côtés pour le libérer, allant dans la direction opposée. Elle connaissait le trajet, elle connaissait les lieux, les cachettes, les sorties. Elle avait arrêté de compter le nombre de fois où elle était venue, celui où elle avait été mise dehors de force, et celui où elle avait miraculeusement échappé ou fui la sécurité. Elle aurait pu lâcher l'affaire, se contenter de traîner un peu autour du bâtiment pour vendre ses produits à ceux qui seraient assez malins pour reconnaître son manège bizarre, voir se contenter du peu de livraisons que son fournisseur lui confiait, mais ce n'était pas assez. Elle voulait plus, plus longtemps, plus souvent, plus facilement, toujours plus, mais surtout elle n'avait rien à perdre. Rien ne comptait vraiment, ni son logement miteux, ni son travail pourri à la superette, ni l'image qu'elle renvoyait, pas même ses relations amicales ou amoureuses qui s'éteignaient comme la flamme d'une bougie en plein courant d'air. Elle laissa glisser son manteau en fausse fourrure de ses bras, l'abandonnant sur un canapé en sachant qu'elle ne viendrait pas le récupérer. Ses mains ajustèrent les longues mèches blondes qui retombaient sur ses épaules et elle s'enfonça un peu plus dans le groupe de chairs mouvantes, ses hanches ondulant naturellement au rythme de la musique. Le souffle chaud, les pupilles dilatées, elle croisa quelques regards, en harponna un, jolie rousse aux yeux d'un noir si profond qu'elle aurait pu se noyer dedans, à moins que ce soit l'ecstasy qui la rendait encore plus belle que ce qu'elle était déjà. La connexion fut presque immédiate, le rapprochement tout aussi rapide, leurs corps se frôlèrent, partageant un moment de complicité et de jeu, jusqu'à ce que Jill se penche à son oreille pour lui murmurer quelques mots. Le processus était toujours le même, trouver une cible, lui faire goûter, vendre, abandonner, recommencer. Parfois elle profitait aussi d'une pause dans les toilettes pour se faire quelques billets en plus mais étrangement les clients et clientes étaient plus à même d'acheter quand ils avaient l'impression que c'était une opportunité
chaleureuse qui leur était proposée. Et puis quand vraiment Jill se sentait trop seule, elle en profitait pour ramener quelqu'un à la maison.
Ses doigts fins glissèrent à l'intérieur du petit sachet dans sa poche pour en tirer un modeste morceau prédécoupé, qu'elle vint glisser entre les lèvres de la rousse. Les minutes défilèrent, sensuelles, enflammées, et le sourire de Jill s'étira à mesure que la rousse devenait plus tactile, moins timide. C'était gagné, dans la poche...
« Treize dollars le cachet, avec deux tu en auras largement pour toute la nuit. » La jeune femme glissa deux billets à Jill sans prendre la peine de demander la monnaie et quelques minutes plus tard elle se retrouva seule avec sa montée, la dealeuse dévorée par la foule. En réalité Jill était allée au bar, profitant de cette monnaie pour s'offrir un verre, dépourvue de carte bancaire. Quelque part, un peu plus loin dans la salle, un vigil l'avait reconnue -la perruque n'était pas de qualité incroyable- et avait signalé sa présence à ses collègues et à sa supérieur, sans savoir pour le moment si elle était là pour consommer ou pour vendre.
(c) AMIANTE